mercredi 5 janvier 2011

Nong Khiaw

À peine arrivé à Luang Prabang, je reprends déjà la route vers le Nord. Direction: Nong Khiaw, au bord de la Nam Ou, dans une région montagneuse et reculée. Le trajet dure trois heures en minibus et traverse plusieurs petits villages. En fait, la destination n’est pas très grande non plus. Voici à quoi ressemble Nong Khiaw: une rue principale non goudronnée et une extension plus "touristique" de l’autre côté de la rivière.



L’idée du voyage était d’avoir un bref aperçu du Nord du Laos, réputé sauvage, voire encore quasiment "vierge" dans les parties les plus reculées, sans toutefois m’embarquer dans un trek de trois jours. L’idée était aussi de prendre un bateau entre Nong Khiaw et Muang Ngoi, situé quelques kilomètres plus haut. Le trajet offre, paraît-il des paysages magnifiques. Finalement, je découvre que les deux bateaux "publics" susceptibles de m’amener à Muang Ngoi arrivent après l’unique trajet quotidien en un sens inverse. C’est donc raté pour un aller-retour dans la journée et je n’ai pas envie de changer d’hôtel, pardon de bungalow. D’autant que j’ai réservé quelque chose de très confortable avec vue sur la Nam Ou.



Le jet lag que je traîne depuis deux jours fait que je n’ai qu’une seule envie: ne rien faire. Je pars juste faire une petite ballade pour explorer les environs:



Je fais la connaissance de ma première vache laotienne:



À peine rentré, je m’effondre de sommeil dès 17h pour me réveiller le lendemain matin. Enfin la bonne nuit réparatrice qui me remet d’aplomb.

Le lendemain, je pars visiter les grottes dans lesquelles les habitants de la région se cachaient durant la guerre du Vietnam. Quel rapport avec le Lao me direz-vous? Officiellement neutre, le Laos s’est retrouvé pris en étau entres les forces belligérantes. Le Viêt Nam Nord utilisait le pays comme base arrière et comme voie de ravitaillement du Sud, notamment par la fameuse piste Hô Chi Minh qui passait par le Laos. Les États-Unis, dont la politique dans la région n’était décidément pas des plus heureuses, ont quant à eux mené des opérations de guerre secrète au Laos en armant des Hmongs, une minorité ethnique présente au Nord du Laos, pour mener des actions de contre-guérilla (c’est la raison pour laquelle de nombreux Hmongs ont ensuite émigré aux États-Unis; leur communauté forme le cadre de Gran Torino, le beau film de Clint Eastwood). Mais les États-Unis ont surtout mené une campagne inouïe et incompréhensible de bombardements intensifs sur le pays. Le Laos subira en moyenne une attaque toutes les huit minutes pendant neuf ans et recevra plus de bombes que l’Allemagne et le Japon réunis au cours de la Seconde Guerre mondiale! De nombreuses bombes à sous-munitions ont été larguées. Le Laos reste aujourd’hui le pays le plus pollué au monde par les munitions non explosées. Des dizaines de personnes meurent ou sont grièvement blessées chaque année.

Quoi qu’il en soit, à peine arrivé sur la zone des grottes, deux petites filles d’une dizaine d’années m’interpellent d’un inattendu "Sabaidee! What’s my name?", suivi d’un plus convenu "Where-do-you-come-from?". Mes trois tentatives de réponse – Switzerland, France et Europe – se heurtent à la même incompréhension. Mais l’essentiel n’est pas là et le tour est bien rôdé. Cette prise de contact est visiblement le sésame qui permet de s’autoproclamer guide touristique sans qu’on ne vous ait rien demandé. Voilà donc mes deux nouvelles copines qui m’ouvrent le chemin et m’accompagnent jusqu’à la grotte. Évidemment, elles attendent un petit billet en retour. Et évidemment, vous vous dites qu’elles feraient mieux d’être à l’école, qu’il ne faut pas encourager la mendicité infantile, que surtout vous ne leur avez rien demandé. Mais évidemment, vous ne pouvez pas résister devant un tel mélange de timidité extrême et d’aplomb résolu. Sur le chemin du retour, elles ont la gentillesse de m’attendre, mais la vitesse et l’agilité avec laquelle ces deux gamines en jupe longue traditionnelle et en tongs dévalent ces chemins abrupts vous font sentir bien vieux et bien lourd. Je leur fais donc signe de ne pas m’attendre. Deux-trois minutes plus tard, je les croise en sens inverse avec un couple de touristes comme nouvelles proies. Elles me saluent d’un "sabaidee" complice et triomphant.

Le trajet de retour au village permet de voir quelques maisons traditionnelles:



Les maisons n’ont pas l’eau courante et les habitants se lavent dans la rivière, mais ils captent par satellite les télévisions thaïlandaises dont la langue est très proche du lao!



Retour de l’école:



Recyclage des cadeaux américains:






Le jour suivant, je rejoins Luang Prabang en bateau. La Nam Ou se jette en effet dans le Mékong quelques kilomètres avant Luang Prabang. Le trajet dure six heures au total, dans un bateau inconfortable et bondé. Mais le voyage est finalement très plaisant. Les paysages sont superbes.



Nous sommes au milieu de la saison sèche et la rivière est très peu profonde. Le bateau doit slalomer en permanence entre des écueils à peine visibles. L’agilité du capitaine est impressionnante, d’autant que les courants sont parfois assez puissants.

Les buffles profitent eux aussi de la rivière:



Surtout le trajet permet de voir l’activité des habitants des petits villages traversés lors de la montée en minibus. Le Laos est l’un des pays les plus pauvres de la planète et l’économie est encore dans une large mesure une économie de subsistance. Visiblement, ces villageois cultivent un peu de riz, élèvent quelques poules, pêchent quelques poissons



et plantent quelques légumes.Mais pas beaucoup plus.



Enfants du village dans lequel nous avons dû faire escale et prendre un songthaew sur quelques kilomètres car le niveau de la rivière était trop bas.

Aucun commentaire: